La bulle de cristal

Il attendait un signe d’elle, et en définitive c’est du vent qui balaya son cœur.

Elle n’avait rien promis que des caresses et des nuits d’amour pour le plaisir. Rien que pour le plaisir.

Il pensait que ses yeux dans les siens et les mots d’amour qu’il semait au vent donnaient une autre dimension à leurs caresses. Il ne baisait pas, il faisait l’amour.

Elle le faisait bien, l’amour. Elle le faisait seulement.

Pourquoi fut-il que ce soit autrement ? Lui qui n’avait connu de l’amour que le pire, et qui ne pouvait lui offrir aujourd’hui que la perspective d’étreintes clandestines.

Il avait construit une bulle à lui qu’il pensait partagée. Elle était de cristal et il espérait dans leurs rares nuits de câlins que le précieux quartz résonnait à l’unisson.

Moment singulier à tous deux, même s’il savait que passé le bonheur de ces instants, elle allait vers d’autres amants. Peu importait pour lui que leurs deux cœurs s’éloignent, s’ils battaient sincèrement d’une grâce partagée le temps d’une nuit, de temps en temps.

Elle était là avec lui et lui seul dans ces moments-là, c’est ce qui importait. Ils étaient deux amants singuliers pour un amour fugace.

Mais elle ne faisait que passer sur lui et les autres.

Aujourd’hui, voici qu’il apprenait de sa bouche qu’un régulier s’immisçait dans leur rendez-vous. Depuis déjà longtemps. Avant, juste avant, et après, juste après, Si près qu’ils auraient pu un jour se croiser par hasard sur le palier ou dans sa rue. Lui qui n’avait plus goût à butiner ailleurs depuis elle.

Elle ne faisait pas cela par vice, non par simple désinvolture, il n’y avait pas de mal, elle n’avait rien promis. Peut-être rien compris de lui, rien ressenti dans la bulle de cristal… Sûrement mieux dans les bras de l’autre.

C’était blessant…

Et alors où était le mal ! hein ? N’était-elle pas libre d’exhiber son préféré à deux pas de celui qui dormait encore dans les draps de leurs derniers ébats. Et quels ébats ! Quel bonheur ! L’avait-elle déjà oublié ?

Le cristal s’est brisé, les mots d’amour dans le vent et la tendresse oubliée.

Elle reviendrait donc en passant, il passerait après, avant l’autre, peu importe, il n’avait pas d’importance, il n’était qu’un passant. Sa parenthèse entre d’autres parenthèses pour une relation qu’elle souhaitait joyeuse et légère et que lui désirait singulière, tendre et complice. Rien de très contraignant en somme que douceur et tendresse proposait-il. Elle ne le voyait pas ainsi…

Pourtant demain peut-être, il l’aimerait encore, il la caresserait de tout son cœur quand elle le voudrait. Il se loverait contre elle, sucerait un téton, glisserait sa langue auprès de la sienne, une main sur son sexe entre d’autres lèvres humides. Il lécherait, banderait fort, si fort qu’il se fondrait sans peine dans son ventre et sur la cyprine étalée. Même ballet de corps à corps, de caresses suaves et de lèvres gourmandes, mais plus comme avant… Le, il ne savait quoi, qui faisait de leur étreinte un bijou, un fruit rare à la saveur subtile s’était évaporé.

Fini, le cristal était brisé…

A son dernier baiser, quand elle partirait, peut-être n’aurait-il plus le cafard, et c’est cela qui lui manquerait, l’envie de lui envoyer encore et encore de tendres textos, des pensées, des mots doux en feu d’artifice ou en envol de bulles de savon pour prolonger…

Pour prolonger quoi ?

Rien, nada ! le vide sidéral d’une relation étrange, sans affect, un jeu de passe-passe d’épidermes sensibles et de sentiments absents.

Ce n’est pas comme ça qu’il avait imaginé de faire l’amour avec cette jolie personne, à la peau si douce, à la voix si claire, au talent si éclatant. Même qu’une fois, même qu’en passant, il ne l’avait jamais vu ainsi avec personne. Même que par le passé, ça lui en avait coûté en chagrin et en bris de cristaux précieux. Son côté fleur bleu irréductible… La face douce de ses penchants libertins.

Pourtant, il continuerait de l’aimer à sa façon, mais en secret pour peu qu’elle lui fasse grâce de son insouciante muflerie.

Il voulait bien être l’irrégulier, le second. Le dernier même ! Pour peu que chaque minute partagée soit pour tout simplement faire l’amour. Terme étrange qui lie l’éternel d’une passion au fugace du libertinage pour le même respect, la même tendresse et les mêmes promesses d’amours.


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