Le sursaut de la Mazurka

Chapitre 2 de : Carnet de bal

Ma zur ka

Un deux trois

Ma zur ka

Un deux trois

Tout avait commencé, pour faire simple, sur ces 12 temps, décomposés par l’animateur des ateliers de danse. Tout avait commencé sur le Ka de mazurka où je devais bondir. Ou si vous préférez :

Un deux hop !

Un deux trois

Des heures à charcuter cette rythmique qui, à première écoute d’une oreille distraite, faisait penser à une valse. Ça pouvait le faire sur trois temps, mais au ka ou au hop, si vous préférez, c’en était fini de l’illusion valsée. Un pied restait suspendu une seconde ou presque.

Les dents serrées comme la main de ma cavalière dans la mienne, j’essayais en vain de faire entrer mes pas dans cette subtile volée à en oublier la musique. Pourtant la mélodie des mazurkas est un grand plaisir. Elle insuffle le plus souvent la joie, l’amour et l’optimisme dans ce petit saut intermittent.

Vint le jour où je bondis enfin au bon temps un certain temps. Vint l’instant où je me permis d’inviter une cavalière pour cette danse reine du balfolk. C’était un soir de bal et pas des moindres. Un soir avec le duo Brotto et Lopez, des pointures. Un soir à leur dernière Mazurka et non la moindre : La candela. Chutt !

Écoutez…

La candela

J’avais bien senti à l’intro que quelque chose clochait. Je ne saisissais ni un ni deux ni trois ni mazurka. Tout allait trop vite ou pas assez ou je ne sais. Le diato planait et la flûte traversière s’envolait sur je n’imagine quel sommet virtuose, au point que j’en perdais le rythme, ses douze temps, ses hop ou autres sursauts.

Ma cavalière m’entraîna alors vers une tout autre danse, faite de douceur dans le bonheur d’un corps à corps suave. Il y avait bien douze pas, je pense, mais le bond devenait long transfert d’un pied sur l’autre. Mutait en lente translation de nos bassins collés.

Soumis à ma partenaire, soumis à la mélopée, je me laissais aller dans une chorégraphie sensuelle bien loin de la dissection comptable des ateliers de danse.

Quatre minutes de pur bonheur à planer plutôt que bondir, à danser plutôt que compter, à lâcher prise sur la musique, trois temps sur douze. Mais au fond, tout glissait, tout allait quand même sans cahot.

Bref, au chut ! final de la Candela, je n’eus point envie de lâcher ma danseuse et elle non plus. Dans ces quelques instants d’immobilité, nous continuions à danser en pensée.

C’est ainsi que j’ai appris que dans le balfolk, les danses évoluaient. La mazurka de nos jours n’a plus en bal le petit bond qui faisait le charme de cette dernière au début du siècle dernier. Ses nouvelles mélodies sont souvent sur un tempo plus lent et autorisent une danse plus coulée, plus en rondeurs voluptueuses.

Mais je sens que certains puristes font déjà des bonds à la lecture de ce texte.

Alors, allons :

Un deux trois

mazurKA

Un deux trois

Un deux hop !

Version Audio

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