Corrigez-moi!

Très cher Anton

Je reçois aujourd’hui votre lettre et vos mots me font chaud au cœur. Je peux désormais espérer que vos douces relectures viennent à nouveau caresser mes pages. J’aime vos encouragements délicieux comme vos railleries sur quelques homonymes trompeurs ou répétitions lassantes. J’aime votre tact dans les suggestions que vous me susurriez par petites touches pour ne pas me froisser. C’est bon, ça mon Anton et j’en veux plus encore !

J’ai hâte de sentir vos virgules écarteler mes phrases. Votre façon à nul pareil de poser le petit chapeau là où il faut et l’accent dans le bon sens. En fait, j’aime tout et si d’aventure vous désiriez accorder mes participes passés faites-le par-devant ou par-derrière même à l’envers.

Oh ! my COD ! J’aime ça aussi !

C’est bon quand j’imagine votre gros Robert qui va et vient dans mon orthographe. Oui, c’est bon, mon Anton, faites-moi tout. Labourez ma littérature brouillonne de votre Bled.

Je sais que vous aimez Littré et Larousse, je les prends tous les deux par tous mes espaces en double et mes parenthèses ouvertes.

Corrigez-moi ! Oui ! Faites-moi mal aussi ! J’aime vos points rageurs comme des coups de reins sur mes phrases trop longues. Humiliez-moi ! Dites-moi encore que c’est nul à chier ! J’aime ça ! Fessez-moi pour la forme. Prenez-moi par la marge à grand coup pour le fond. Griffez-moi le dos et le premier de couverture. Je suis à vous ! Revenez-moi vite pour chipoter ma syntaxe et inonder mes coquilles de votre savante liqueur littéraire.

Mais je m’égare Anton, J’en suis toute chose et décoiffée. Il est grand temps que je vous laisse pour prendre une douche de rimes froides.

Votre esclave grammaticale

Émeline

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