Un homme perdu sur l’autoroute, après une nuit de route se décide à s’arrêter dans un village non loin de Nîmes.
Le poids lourd déboite, je ralentis, un coup d’œil au rétro, la voiture derrière est encore loin, le cligno, je déboite aussi, troisième voie, 130 km heure. Le rétro de droite voit s’éloigner le poids lourd, je me rabats, un autre gros cul se profile devant.
Elle devait m’envoyer un texto, mais rien. Un bip, il arrive, je ne veux pas saisir le portable, mon cœur bat à cent trente au moins. J’attends, je le lirai plus tard, à la prochaine aire de repos ou la prochaine sortie. Je suis crevé, j’ai sommeil. Je roule pour rouler, pour oublier. Pour que ma vie défile plus vite que le temps, pour être plus vieux de plusieurs heures, plus vieux de quelques kilomètres. Plus loin du paysage qui me rappelle trop nous deux. La nuit a défilé, la carte de France aussi : Lyon, Valence. Je n’ai pas le courage d’aller plus loin. Pourtant, je poursuis, Montélimar, Nîmes. Mes yeux papillonnent, j’ai fait un écart ! Bordel ! j’arrête là, sur ce village suspendu sur cette colline avec un clocher dressé. Il doit y avoir une sortie. Oui, Gallargue, va pour Gallargue ! Je donne mon ticket à la femme-tronc, qui m’a fait un gentil bonjour, je ne sais plus si je le lui ai rendu. Elle est jolie au fait, mais peu importe, je meurs de l’envie de lire ce texto, je meurs de l’envie de dormir, je rêve de moteur éteint, de route immobile.