Paul MARTIN
Saint Étienne
février 1943
La nuit était tombée, un petit vent glacial portait quelques cristaux de neiges. Le trottoir blanchissait doucement et marquait à la trace l’inspecteur Martin en étouffant le bruit de ses pas. Il remonta le col de son manteau et ajusta son chapeau presque machinalement. Il sortait d’un commissariat du centre-ville de Saint-Étienne en l’an de grâce 1943. La journée de travail s’achevait, la blague de tabac était presque vide et sa pipe chaude. La bouche sèche d’une menace permanente qui ne laissait pas une seconde de paix dans son esprit en guerre dans cette ville occupée. Son ouïe aux aguets lui jouait des tours. Une envie irrépressible de se retourner le saisissait par instant. Sa nuit ne faisait que commencer. Juliette sa femme ne dormirait pas non plus. Enceinte de sept mois, le fœtus sautera dans son ventre jusqu’au retour de son papa.
Il s’arrêta un instant à l’angle d’une rue sans réverbères, le temps de balayer furtivement ses arrières, il s’engouffra dans ce havre obscur et anonyme.